Comme en 2007, les entreprises du médicament regroupées sous la bannière du LEEM, entendent s’inviter dans le débat des présidentielles. Annoncée il y a quelques jours, leur lettre ouverte aux candidats à la présidence de la République vient de paraître sous le titre : « L’industrie du médicament au cœur du défi français ». La plateforme du syndicat professionnel interpelle les parlementaires et l’ensemble des acteurs de santé sur l’avenir industriel de la France et sur son rôle dans l’innovation thérapeutique.
Relever le défi de l’innovation
Aussi, le LEEM a-t-il décidé de mettre au menu de sa plateforme quatre propositions qui lui paraissent de nature à, selon ses termes, « participer au renforcement d’une filière française de haute technologie, reconnue pour l’excellence de ses atouts industriels et scientifiques ». La première se propose de « relever le défi de l’innovation et de la sécurité, en développant une politique de coopération scientifique entre recherche publique et recherche privée ». Une voie déjà bien ouverte et dans laquelle nos industriels se sont engagés en s’équipant de tous les outils possibles pour la conforter au meilleur niveau possible. Le Conseil Stratégique des Industries de Santé (CSIS) de 2009, comme celui de janvier dernier, ont renforcé cette stratégie en la dotant de quelques solides appuis. L’industrie « chimique » de la pharma manquant par ailleurs furieusement de nouvelles molécules pour prendre le relais de blockbusters désormais génériqués, ses promoteurs savent de longue date depuis leur « falaise des brevets » qu’il ne saurait y avoir de salut hors d’une solide coopération avec la recherche publique, comme avec les biotechs.
Une politique de régulation du médicament acceptable
La seconde proposition vise à développer l’attractivité de la France dans la compétition internationale, « en garantissant la cohérence entre politique de régulation du médicament et politique d’attractivité ». Ici l’exercice demandé au futur responsable des affaires du pays promet d’être plus difficile à réaliser. Car l’industrie a déjà quitté les rives de l’Europe pour les lointaines et attractives contrées asiatiques où lui sont promis des marchés qu’elle n’ose déjà plus espérer dans ses ancrages historiques traditionnels. Aussi, si l’hypothétique nouvelle hausse de TVA de 1,5 point – programmée par Nicolas Sarkozy pour la rentrée, s’il est encore en place – a pour vertu principale d’alléger les charges des entreprises pour les rendre plus compétitives, il n’est pas certain qu’elle suffise à maintenir les productions pharmaceutiques dans l’Hexagone.
Réussir le développement des biotechs
Un autre point évoqué par le LEEM voudrait que la France mise sur une politique industrielle d’avenir, « en soutenant la production industrielle en France, en réussissant la mutation de la production pharmaceutique et le développement des biotechnologies ». Sur le premier point, le LEEM, qui revendiquait hier pour la France sa place de leader européen des productions de médicament, semble avoir abandonné cette dernière prétention. Sur le second, il n’est jamais trop tard pour bien faire. Mais la proposition du LEEM a déjà été formulée dans le passé et les analystes avisés du secteur savent que les cartes sont déjà battues sur ce dernier terrain, la France s’étant en quelque sorte fait damer le pion par la perfide Albion, entendu le Royaume-Uni . Notre champion national, Sanofi, a certes annoncé en mars 2010 faire vouloir évoluer, d’ici 2014, son activité chimique vers les biotechnologies et la production de vaccins. Il a alors décidé d’investir 150 millions d’euros sur ses sites industriels dont 90 millions d’euros pour les sites de Saint-Aubin-lès-Elbeuf (Seine-Maritime) et de Vertolaye (Puy de Dôme). Plus récemment, le groupe français a fait savoir qu’il démarrait à Vitry-sur-Seine un atelier de production dédié aux biotechnologies à culture cellulaire. Un « Biolaunch » pour lequel il a décidé d’investir 200 millions d’euros en se positionnant en « pionnier de la production d’anticorps monoclonaux ». Reste que les projets de ce style ne sont pas légion en France et que les représentants des biotechs espèrent aussi qu’on les entendra aussi sur leur souhait de structurer la filière industrielle et de favoriser les collaborations entre les grands groupes et les PME innovantes. Car la France en compte, semble-t-il, sans qu’elles soient réellement soutenues par leur grand frère de la pharma !
Jean-Jacques Cristofari
(1) « le médicament : enjeu du XXIème siècle », Le Cherche Midi, mars 2010
(2) Il s’agit de Frédéric Soubeyrand, directeur général des Laboratoires Bouchara Recordati
Journaliste spécialisé en économie de la santé En savoir plus ...
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