Marchés pharma : l’OTC en berne, le générique se cherche un nouvel élan

Marchés pharma : l’OTC en berne, le générique se cherche un nouvel élan
mars 13 16:16 2011 Imprimer l'article

[singlepic id=140 w=320 h=240 float=left]Alors que le marché des produits dit d’automédication (OTC) connaît pour la 1ère fois une stagnation sur le marché français, les génériques poursuivent leur ascension sans atteindre toutefois les taux de pénétration observés par ailleurs en Europe. L’Afipa pour les premiers, le Gemme pour les seconds dressent l’état des lieux.

L’année 2010 n’est pas à marquer d’une pierre blanche pour la pharma. Le marché de l’automédication, entendu des médicaments de prescription médicale facultative non prescrits – avec en leur sein ceux qui relèvent de l’OTC strict, c’est à dire « non remboursables et non prescrits » – aura l’an passé enregistré un recul de 1,2 % en volume et de 0,8 % en valeur. « Le libre accès s’affirme comme une tendance de société dans le secteur plus atone de l’automédication », commente cependant l’Afipa, association professionnelle
médicament d’automédication, qui estime malgré ces baisses que « les perspectives sont encourageantes pour le secteur ». Le total des ventes de médicaments d’automédication s’est élevé à quelque 420 millions d’unités, ce qui représente 14,1 % du marché pharmaceutique hexagonal en volume, et 1,9 milliard d’euros, soit 6,4 % du marché en valeur, selon les données fournies par IMS. L’OTC strict a généré des ventes de l’ordre de 282 millions d’unités (en baisse de 1,1 %) pour une valeur de 1,59 milliards d’euros (en diminution de 0,7 % par rapport à 2009). « Ces variations s’expliquent principalement par une année 2010 sans pathologie notable et l’impact de la crise sur le pouvoir d’achat des ménages qui diffèrent leurs dépenses de santé », commente encore l’Afipa. Au total, le marché dit de la « médication officinale » – selon les termes en vigueur dans les rangs des syndicats de pharmaciens -, ouvert au libre accès depuis trois années en juillet prochain et doté de 350 médicaments, n’aura pas permis à ces mêmes officines de générer les relais de croissance attendus, ni de compenser la chute drastique des marges qu’observe ce secteur (300 millions en 3 ans). Du coté des prix, il faut encore noter que ces derniers sont restés stables, avec une progression limitée à 0,4 %. Le prix moyen d’un médicament d’automédication s’est élevé à 4,60 euros et celui des produits d’OTC strict à 5,63 euros. 2010 fut de ce point de vue une année riche en switchs, note l’organisation des industriels pour qui ces derniers « qui nécessitent souvent de longues années de préparation et l’obtention de nombreuses autorisations règlementaires, apportent aux patients/consommateurs des réponses à leurs problèmes de santé dans de nouvelles pathologies ».
qui représente les industriels du

Les Français ne connaissent pas les prix

L’Afipa a, par ailleurs, fait réaliser une enquête (1) sur le libre accès (qui concerne une officine sur deux en France) dont ils ressort que 62 % des Français ayant répondu dépensent en automédication (350 médicaments disponibles) plus de 20 euros par an pour l’achat des médicaments (dont 32 % plus de 50 euros). Ils sont, en 2011, 33 % à acheter des médicaments en libre accès plus de 5 fois par an et 22 % à le faire entre 2 et 5 fois. 85 % des répondants souhaitent à cet égard une séparation claire entre médicaments et autres produits disponibles en officines. Enfin, 70 % des répondants disent ne pas connaître les prix des médicaments d’automédication et moins de 25 % comparent les prix d’une officine à l’autre, preuve que le médicament est encore loin d’être un produit de consommation courante !

Génériques : des prix sous la moyenne européenne

Du côté de génériques qui connaissent, selon le GERS/CEGEDIM une évolution tant en nombre de boites vendues (630 millions, + 5,8 %) en 2010 que du chiffre d’affaires réalisé (2,7 milliards, + 10,4 %), ses industriels mettent en avant les économies qu’entraîne l’utilisation des médicaments ayant perdu leur brevet. Soit quelque 1,7 milliard d’euros l’an passé, équivalent à plus de la moitié du chiffre d’affaires des fabricants. Des économies rendues possibles, selon le Gemme, association qui rassemble les fabricants de génériques, « grâce à la forte pression appliquée sur les prix des médicaments génériques ». Craignant que l’assurance-maladie ou le gouvernement ne soit tenté à l’avenir d’opérer de nouvelles baisses de prix sur les génériques, comme cela a déjà été le cas depuis 1999, date d’entrée en vigueur de la substitution par les pharmaciens d’officine, le Gemme a fait réaliser une étude sur « le modèle économique du générique, quelle efficience ? » Pour savoir si les prix pratiqués en France était compétitifs, le Gemme les a fait comparer à ceux pratiqués chez nos voisins européens. L’étude compare ainsi dans 10 pays européens 74 molécules en 196 présentations, soit 80 % du chiffre d’affaires des génériques remboursables en France. Il en ressort que le prix moyen par unité fabriquée est de 0,45 centimes d’euros, soit 4 % inférieur au prix moyen européen. « Une décote qui est accentuée lorsque l’on prend en compte le « coût de la vie » dans les pays analysés : le prix des génériques est alors de 12 % en dessous du prix moyen européen », souligne le Gemme. L’étude s’appuie sur les bases de données brutes disponibles d’IMS, exprimées en prix fabricants hors taxes. Elle ne compare donc pas des prix publics, à partir desquels des comparaisons internationales sont plus pertinentes et parlantes.

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Le Gemme en conclusion à son étude estime qu’en matière de prix « les objectifs sont atteints » et plaide en conséquence pour un moratoire sur les baisses. Pour l’association présidée par Pascal Brière, pdg de Biogaran (filiale de Servier) 1 % de baisse de prix ne génère que 27 millions d’économie pour la Sécu, soit l’équivalent d’1 % de substitution supplémentaire (= 26 millions d’économies). Une substitution qui, selon le Gemme, est mise à mal par les indications NS (non substituable) portées par les médecins sur leurs ordonnances. L’association plaide pour un « développement impératif des prescriptions des médecins au sein du périmètre concurrentiel ». A cet égard 1 % de prescriptions complémentaires dans le répertoire entraînerait à lui seul des économies supplémentaires de 100 millions d’euros.  » Pour favoriser les génériques, il faut plutôt sensibiliser les médecins à l’impact du report des prescriptions vers la nouveauté et de l’augmentation des mentions « Non substituable », qui mettent en danger le développement du générique et génèrent des pertes d’économies importantes », commente à cet égard Catherine Bourrienne-Bautista, déléguée générale du Gemme (4). En conclusion, le générique constitue bien aux yeux du Gemme un levier efficace pour accroître l’efficacité du système. A condition que les autorités de santé permettent aux industriels de se développer sans pratiquer de nouvelles baisses de prix. La rentabilité des entreprises de la branche (entre 0 et 5 %) étant considérée par le Gemme comme trop faible pour pouvoir supporter de nouvelles baisses. Reste que dans les pays voisins (3) où dominent effectivement les génériques, la bataille sur les prix a souvent été le levier de leur montée en puissance.

Jean-Jacques Cristofari

(1) Enquête réalisée sur Internet par la mise en ligne de questionnaires auto-administrés, avec diffusion du lien internet via les réseaux sociaux. 468 questionnaires ont été exploités.

(2) Les prix ont baissé en février 2006 entre 15 et 19 %, puis en mai 2008 de 17 %, en mars 2009 de 5 % et enfin en mars 2010 de 100 millions d’euros sur les gros dosages de statines et d’IPP. Des baisses qui interviennent sur les prix d’introduction des génériques, qui sont depuis 2009, de 55 % inférieurs aux prix des médicaments de référence avec une baisse supplémentaire de 7 % après 18 mois. En 2002, le différentiel de prix entre le princeps de référence et son générique était de 30 %.

(3) La part du générique est de 67 % en Allemagne, de 61 % au Royaume-Uni, de 59 % aux Pays-Bas, contre seulement 24,4 % en France (source EGA)

(4) Impact-Santé.fr du 14 mars 2011.

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Le Marché pharmaceutique de ville en chiffres ( selon IMS health)

Les ventes totales en pharmacie = 3,5 milliards d’unités, en baisse de 1,7 %, 35 milliards d’euros (prix public) en croissance quasi nulle (+ 0,1 %)
Le marché des médicaments (AMM) en chiffre d’affaires = 30 milliards d’euros en prix public (-0,3%)
Le marché des prescriptions obligatoires = 24,7 milliards d’euros (+ 0,5 %)
Le marché des prescriptions facultatives = 5,3 milliards d’euros (-3,9 %)
Le marché de l’automédication (PMF* non prescrits) = 1,9 milliards d’euros (- 0,8% %), 36,4% de la PMF, 419,9 millions d’unités vendues (14,1 % des médicaments)
Le marché de l’OTC strict = 1,59 milliard d’euros (- 0,7 %), 281,9 millions d’unités vendues (- 1,1 %)
* PMF : prescription médicale facultative

[singlepic id=139 w=320 h=240 float=] Source : IMS/AFIPA

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Jean Jacques Cristofari
Jean Jacques Cristofari

Journaliste spécialisé en économie de la santé En savoir plus ...

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