[singlepic id=772 w=2800 h=200 float=left]Alors que les acteurs de la chaîne du médicament opérant en France, en particulier les syndicats d’officinaux et l’Ordre des Pharmaciens, freinent des quatre fers le développement des ventes de médicaments via Internet (1), l’Allemagne enregistre un véritable boom des achats de produits pharmaceutiques sur la toile. Le syndicat allemand des officines de vente à distance, le BVDVA (2), vient, à l’occasion de son congrès annuel, de dresser le panorama d’une pratique plébiscitée par un bon tiers des Allemands, qui recourent régulièrement à des enseignes comme DocMorris, Zur Rose, Sanicare und Europa Apotheek, parmi les leaders du marché des ventes sur Internet qui compte à ce jour 2861 officines.
Autorisé outre-Rhin depuis 2004, le commerce allemand de ventes à distance, sur Internet, de médicaments vit depuis bientôt une décennie des jours heureux : 35 % des Allemands ont, au cours des trois dernières années, réalisé au moins un achat de médicament auprès d’une officine de vente par correspondance (Versandapotheke) . « Les clients des officines de vente à distance sont fidèles à ce mode d’achat », souligne en mai le BVDA (3), qui note que plus d’un tiers des Allemands interrogés ont utilisé ce canal de vente plus de 10 fois durant les 3 dernières années. Les plus gros acheteurs sont, en la matière, les seniors de plus de 60 ans (32 %), suivis des 40-49 ans (20 %) et enfin des 50-59 ans (17 %), comme le révèle une étude diligentée par le syndicat auprès de la société Bonsai Market Research (2).[singlepic id=770 w=220 h=140 float=right]
Un quart des acheteurs sur Internet vit à la campagne
Selon les Länder, les plus forts consommateurs de médicaments achetés sur la toile sont les Allemands de NordRhein-Westfalen, suivi de ceux du Bade-Württemberg (17 %), de la Bavière (13 %) ou encore des Länder de la Hesse (9 %) ou de Niedersachsen (8 %). Ils résident plutôt dans les banlieues des villes (36 %), en centre ville (27 %), dans une ville ou commune allemande (14 %) et dans une moindre mesure à la campagne (24 %). Les utilisateurs de services à distance offerts par les officinaux sont des internautes avertis, qui pour 97 % d’entre-eux vont sur Internet quotidiennement. Si 36 % des utilisateurs de ces services y ont eu recours plus de 10 fois durant les trois dernières années, 16 % l’ont fait de 7 à 10 fois sur la même période, 26 % de 3 à 6 fois et 21 % de 1 à 2 fois.
Les Allemands qui recourent à l’achat de médicament via Internet ne vivent pas très loin d’une pharmacie de quartier ou de village : 27 % ont une officine entre 500 et 1 000 mètres de leur domicile, 26 % entre 250 et 500 mètres et 15 % à moins de 250 mètres. Pour 16 % des internautes, l’officine se situe entre 1 000 et 2 000 mètres et 11 % doivent marcher de 2 000 à 5 000 mètres. Seulement 6 % des mêmes Allemands qui achètent à distance ont une pharmacie à plus de 5 000 mètres de chez eux. Enfin, la plus part des utilisateurs de ces services vivent en famille de 2 personnes et plus (78 %) et 43 % ont un niveau bac +. Selon le niveau de revenu des utilisateurs, 31 % gagnent entre 2 000 et 3 000 euros net par mois, 27 % plus de 3 000 euros et 24 % entre 1 000 et 2 000 euros.
[singlepic id=773 w=240 h=160 float=left]1er motif de recours : le prix
Le prix (voir graphique ci-après) et le service constituent les critères qui dominent aux yeux des Allemands qui achètent leurs médicaments sur Internet, devant la possibilité de réaliser des achats à toute heure, les offres intéressantes de produits, la commodité à effectuer des achats sur la toile, la rapidité ou encore la discrétion. La qualité du conseil n’intervient qu’en 8ème position, devant la sécurité ou l’éloignement de la pharmacie en dur. Près de la moitié des Allemands qui achètent leurs produits à distance (46 %) a déjà présenté une ordonnance à une pharmacie sur l’Internet : ils répondent dans ce registre que, la plupart du temps, ils commandent des produits en vente libre (sans ordonnance), que la procédure pour acheter des médicaments sous ordonnance est trop longue, qu’elle ne présente pas de bénéfice financier pour l’acheteur (le produit coûte aussi cher qu’en pharmacie), qu’ils ne bénéficient pas dans ce cadre d’un conseil pharmaceutique ou encore que « cela est trop compliqué » ! Enfin, si les Allemands considèrent majoritairement que l’offre de produits vendus à distance est insuffisante et doit être élargie aux cosmétiques ou aux produits pour soins du corps, ils attendent surtout (à 80 % d’entre-eux), pour les spécialités vendues sous ordonnance, de pouvoir bénéficier de rabais ou de bonus sur leur ticket modérateur ! Car si la guerre des prix des médicaments OTC fait rage sur la toile, rien n’a encore été proposé aux assurés sociaux allemands pour réduire la part de leurs restes à charge !
Jean-Jacques Cristofari
[singlepic id=779 w=180 h=120 float=left](1) A compter du 12 juillet 2013, les officines qui souhaitent ouvrir un portail internet de vente à distance de médicaments en France disposent d’un cadre juridique précis pour le faire. Voir à cet effet l’Arrêté du 20 juin 2013 relatif aux bonnes pratiques de dispensation des médicaments. Catherine Lemorton (photo), pharmacienne à Toulouse et Présidente de la Commission des Affaires Sociales à l’Assemblée Nationale se prononce sur Pratispharma contre les ventes de médicaments sur Internet. L’Ordre des Pharmaciens a publié la liste des officines habilitées à vendre des médicaments sur la Toile. Elles sont 44 fin juillet 2013 à s’y être lancées.
(2) Union fédérale des officines allemandes de vente à distance.
(3) « BVDVA, étude sur le commerce par correspondance », 28 mai 2013, menée auprès de 500 personnes représentatives de la population allemande entre le 17 et le 22 mai 2013. Le BVDVA ou Bundesverband Deutscher Versandapotheken, rassemble les principales enseignes officinales de vente à distance de médicament.
Les internautes vigilants sur les prix
91 % des acheteurs sur la toile comparent les prix avant leur achat, vs 11 % des Allemands qui se rendent à leur officine (Source : Bonsai Market Research, mai 2013, étude menée auprès de 229 clients de pharmacie ayant acheté un antalgique)
Ventes de médicaments par Internet en Allemagne : faits et chiffres
3 010 officines sont agréées en Allemagne pour vendre des médicaments sur la toile, soit 14,4 % des 20 900 pharmacies en dur allemandes. 16 millions d’Allemands ont passé des commandes en 2012, soit 30 % des internautes allemands. 5,4 % des officines de vente à distance réalisent un commerce « on line » vraiment actif.
Le chiffre d’affaires des officines de vente par correspondance s’est élevé à 1,4 milliard d’euros en 2012, sur un marché du médicament qui représente 45,5 milliards d’euros la même année. La part de marché des produits dits OTC (produits en vente libre et sans ordonnance) représente 12 % du total des ventes à distance.
Le chiffre d’affaires des spécialités avec ordonnance et des biens médicaux vendus par correspondance a augmenté de 7 % en 2012, alors que le marché officinal a cru de seulement + 1 % en valeur et reculé de 1 % en volume l’an passé
D’ici 2020, le marché des ventes officinales à distance devrait augmenter de 110 % et celui des ventes par correspondance des produits soumis à ordonnance de + 17 %. La concurrence que se livrent les officines sur la toile est sévère : un site spécialisé compare les prix des spécialités pharmaceutiques vendues par ces dernières.
(Source : Deutsches Institut für Medizinische Information und Dokumentation, Versandapothekenregister (www.dimdi.de) et IMS OTC Report)
Journaliste spécialisé en économie de la santé En savoir plus ...