[singlepic id=272 w=320 h=240 float=left]La note payée par les mutuelles en médicaments prescrits a été de près de 3 milliards d’euros en 2010, soit 11 % du montant total des produits pharmaceutiques remboursés par l’assurance-maladie et 27,7 % de l’ensemble des dépenses prises en charges par les assureurs complémentaires. Si les ventes de génériques, cheval de bataille de la Mutualité Française, continuent de progresser, elles ne représentent toutefois que 15 % en valeur du marché total du médicament. Leur progression est contenue du fait d’une utilisation plus systématique de la mention NS (non substituable) sur les ordonnances délivrées au Français, qui acceptent moins bien ces spécialités tombées dans le domaine public. En 2010, note encore la FNMF, les dépenses de médicaments par personne protégée ont progressé de 1,9 %, principalement du fait de l’augmentation des dépenses prises en charge à 100 %.
En 2010, les dépenses de médicaments par assuré social se sont élevées en moyenne à 435 euros. Sur ce dernier montant, 129 euros ont été pris en charge par le régime obligatoire (hors 100 %), 94 euros par les mutuelles au titre du ticket modérateur (TM) et 212 euros dans le cadre du 100 % des affections longue durée. Si les deux premiers postes sont en légère régression, le troisième est en hausse, traduisant le poids croissant des maladies chroniques et du vieillissement de la population dans l’évolution de la dépense moyenne (voir schéma ci-dessous). Au plan de la répartition de la dépense de soins et de biens médicaux, le poste « médicaments » représente en 2009 27,7 % des dépenses remboursées par les mutuelles, contre 17,3 % de celles prises en charge par le régime général de l’assurance-maladie (1). Ce poste « pharmacie » représente donc pour les mutuelles la première de leur charge, devant ceux des médecins (16,9 % de leurs dépenses), des autres biens médicaux (14,1 %) ou encore des dentistes (13,8 %).
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Les complémentaires : 3ème financeur du médicament
On comprend à la lecture des chiffres relatifs aux ven, LEEM, Lajouxtes de médicaments en France que la Mutualité s’inquiète de leur évolution. Ainsi, selon IMS, sur un total de 30,2 milliards d’euros de ventes de médicaments en pharmacie (3 milliards de boîtes), 28,2 milliards (2,6 milliards de boîtes) font suite à des prescriptions de médecins. Sur ce dernier montant 27,1 milliards d’euros entrent dans le domaine du remboursable, contre 1,1 milliard qui ne le sera pas. « En 2010, les ventes de médicaments prescrits et remboursables ont progressé de 0,7 % en valeur mais ont diminué de 1,2 % en nombre de boîtes », commente la Mutualité, qui rappelle que les assureurs complémentaires sont en France le 3ème financeur (avec 11 %) des dépenses de médicaments, après la Sécurité sociale et les ménages (qui en financent 17 %). Signe que la crise est bel et bien passée par là, l’envol attendu des médicaments achetés dans ordonnance – en libre service – n’a pas eu lieu : En 2010, avec des ventes de l’ordre de 1,957 milliard d’euros, le marché de l’automédication reste atone et les volumes de ventes ont chuté de 1,4 %. Priorité reste donc pour les Français de pourvoir au remboursement des médicaments achetés.
Génériques : le recours au répertoire faiblit
Aussi la Mutualité espérait-elle qu’un recours massif aux génériques puisse lui faire baisser la note. En progression depuis des années, avec 4,5 milliards de ventes en 2010 (3,5 en 2007), les génériques continuent leur envol (671 millions de boîtes vendues), mais ils ne représentent toujours que 15 % en valeur du marché total, loin derrière ce que l’on peut observer sur les marchés allemand, anglais et américain. Pire, le recours aux génériques au sein de ce que l’on nomme le « répertoire » (qui regroupe les médicaments qui ne sont pas protégés par un brevet) faiblit. Depuis 2008, la diminution de la part du générique est ainsi de 4 points et se fait au profit des médicaments de référence, explique la FNMF. Une érosion qui « s’explique notamment par une utilisation plus systématique sur les ordonnances des médecins de la mention NS (non substituable) et par une moindre acceptation des génériques par les patients. » Soit deux facteurs combinés qui inquiètent la Mutualité Française, qui considère « qu’à qualité des soins égale, les génériques permettent de réaliser des économies pour financer l’innovation thérapeutique. » Un plaidoyer qui ne convainc pas tous les médecins dont certains, pour certaines spécialités, considèrent que la bioéquivalence des produits – entre original et copie – n’est pas toujours au rendez-vous (cf. Pharmanalyses, « génériques contre princeps ») ou qui, pour ne pas perturber un traitement qu’ils ont eu du mal à mettre en place et à faire respecter par leur malade, apposent de plus en plus souvent la mention « NS ».
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« Les médicaments génériques restent fortement concurrencés par les médicaments dits de marque qu’ils soient protégés ou non par des brevets », note la FNMF qui trouve ici plusieurs explications, dont : « la mise en place de nombreuses stratégies d’entrave au développement des génériques par les laboratoires princeps (dépôts de brevets secondaires, litiges et conflits, campagnes de dénigrement, stratégies de contournement des génériques…), l’influence de la visite médicale à caractère promotionnel des laboratoires pharmaceutiques sur les habitudes de prescriptions des médecins en faveur de médicaments protégés par des brevets (non substituables par des génériques) ou bien encore l’étroitesse du répertoire des génériques qui n’intègre pas des molécules anciennes comme le paracétamol ou l’aspirine, ou des spécialités pharmaceutiques sous forme d’aérosols, etc. » Soit autant de facteurs qui ne sont pas tous, loin s’en faut, validés dans les faits, mais auxquels il est de bon ton, par ses temps d’Assises, de faire référence pour mieux diaboliser une branche d’industrie que ses représentants, Christian Lajoux, patron du LEEM en tête, estiment depuis quelques temps victime d’une campagne de dénigrement assimilable aux « procès en sorcellerie d’un autre temps ».
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Enfin, l’étude de la Mutualité souligne également que les Français sont fidèles à leur traitement, n’est déplaise aux Cassandre. Car malgré la chute des dépenses des médicaments à vignette orange (remboursés à 15 %), le ticket modérateur de ces produits a progressé de 5 % sous l’effet du transfert de charge, la note étant de 769 millions d’euros pour les mutuelles contre 421 millions pour le régime obligatoire en 2010. Le déremboursement de produits pharmaceutiques pour service médical rendu insuffisant ne suffit pas à stopper totalement leur consommation, les malades s’estimant satisfait de leur traitement, même si la Mutualité observe « une diminution significative du nombre de boîtes délivrées en pharmacie qui a amorti en partie le poids du transfert de charge vers les complémentaires ».
Jean-Jacques Cristofari
(1) Selon les comptes nationaux de la santé 2009, publiés en septembre 2010.
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Journaliste spécialisé en économie de la santé En savoir plus ...