« Les pharmaciens sont continuellement mobilisés dans la lutte contre la crise sanitaire, mais à quel prix ? », s’interrogent conjointement les représentants de la profession, syndicats et Ordre des pharmaciens. Récemment pris à partie par des anti-Passe et des anti-vaccins, les pharmaciens d’officine font part de leur indignation. Depuis juillet, la pandémie repart de plus belle et les anti-vaccins veulent dominer la scène médiatique.
Quelque 200 000 personnes battent régulièrement le pavé depuis quelques week-ends en faisant valoir leur droit à la liberté de ne pas être vaccinés. Parmi eux de nombreux mécontents de la politique conduite par l’actuel gouvernement, des gilets jaunes qui reviennent sur le devant de la scène et des fervents opposants à toute forme de vaccination. A l’heure où le gouvernement est en passe d’imposer une vaccination obligatoire et pleinement justifiée des professionnels de santé en prise avec des malades, dans les EHPAD, les hôpitaux voire en ambulatoire, une minorité pousse la contestation en prônant des slogans pour le moins surprenant voire en arborant des étoiles jaunes d’une autre époque, plus tragique.
Un récent sondage réalisé par Doctoclass auprès de 1136 infirmières et infirmiers libéraux (IDEL) sur la vaccination COVID-19 et les contraintes sanitaires imposées aux soignants, fait ainsi ressortir que 12% d »infirmiers seraient réfractaires à la vaccination. Selon les résultats de l’enquête menée fin juillet, 80% des IDEL sont vaccinés. Mais 63% des non-vaccinés ne comptent pas se faire vacciner en dépit des contraintes qui vont entrer en vigueur. On comprend que les plus réfractaires cherchent pour l’heure un soutien dans la population, en l’occurrence parmi les plus remontés des Français contre les conséquences de la crise sanitaire. Reste que le 31 juillet, la France comptait 23 471 nouveaux cas de personnes atteintes par le variant Delta et une moyenne de plus de 20 000 cas par jour sur la semaine écoulée. On sait désormais avec certitude que le variant se propagera pour créer une 4è vague pandémique que seule la vaccination la plus large de la population pourra endiguer. Les derniers chiffres connus sur les patients hospitalisés ne sont pas rassurants !
« La France fait actuellement face à une escalade des violences à l’encontre des pharmacies d’officine et des professionnels y exerçant« , commentent de concerts l’USPO, la FSPF, le CNOP et l’ANEPF qui en appellent à l’apaisement.« Depuis un an et demi, le monde est plongé dans une crise sanitaire majeure mobilisant au quotidien l’ensemble des professionnels de santé, dont les pharmaciens d’officine et leurs équipes sur l’ensemble du parcours de soin, poursuivent ces derniers qui estiment avoir fait le job : délivrance de masques, conseils, accompagnement des patients pour assurer la continuité des soins, réalisation de tests antigéniques, vaccinations. » Et travail parfois jusqu’à l’épuisement, ces derniers ont su répondre à l’appel pour assurer leur mission de santé publique auprès de la population.«
Condamnation unanime
La semaine écoulée a connu un déchainement soudain de violence qui s’est exprimé à l’encontre de pharmaciens pris àpartie, notamment à Montpellier le 31 juillet, injuriés par les manifestants au cri d’ « assassin », de « fascistes » ou de « collabo » et dont les barnums de prises de tests installés devant leur devanture ont été vandalisés ou encore une officine incendiée. » Si les craintes à l’égard du vaccin et des privations de libertés peuvent s’exprimer, les professions de santé, pleinement engagées depuis le début de l’épidémie pour protéger au mieux les Français, ne doivent en aucun cas subir les frais de tels actes, choquants et intolérables« , notent encore les signataires d’un appel commun.Rien ne pouvant justifier de tels agissements. Pour Gilles Bonnefond, officinal à Montélimar et ancien président de l’USPO ces réactions sont « choquantes », car les pharmaciens « sont au service des malades, au service de la population et au service de la lutte contre l’épidémie. »L’Ordre national des pharmaciens, les syndicats de titulaires d’officine représentés par la FSPF (Fédération des Syndicats Pharmaceutiques de France) et l’USPO (Union des Syndicats de Pharmaciens d’Officine), ainsi que l’ANEPF, représentant les étudiants en pharmacie de France, condamnent fermement ces actes de violence et appellent d’unemême voix au respect de tous les professionnels de santé. « La profession continue et continuera de prôner l’écoute, le dialogue et la pédagogie envers le patient et adresse tout son soutien aux confrères victimes d’agressions et d’actes devandalisme, mais aussi à leurs équipes, souvent épuisées par ces dix-huit mois de lutte contre la Covid-19. »
De son côté, L’Ordre des médecins condamne avec la plus grande fermeté ces actes de violence et d’intimidation et exprime son soutien aux médecins, aux pharmaciens et, plus largement, « à tous ces professionnels attaqués et menacés, et rend hommage à leur engagement tout au long de cette crise sans précédent. » Il rappelle que, depuis plus d’un an, tous ces professionnels sont pleinement engagés et portent notre système de santé à bout de bras depuis le début de la crise sanitaire. « Rien ne saurait justifier qu’ils soient attaqués aujourd’hui, alors qu’ils étaient applaudis il y a un an pour leur engagement à soigner et protéger leurs concitoyens « , conclut le CNOM.
Jean-Jacques Cristofari
Journaliste spécialisé en économie de la santé En savoir plus ...