Annoncée pour une mise en œuvre dès 2018 dans les territoires et au plan national, la Stratégie Nationale de Santé (SNS) vise à rendre prioritaires la prévention des maladies et la promotion de la santé. Les assureurs complémentaires pourront y jouer un rôle.
Le 31 décembre dernier a vu la parution d’un décret qui officialise la Stratégie nationale de santé, dont les grandes lignes ont été présentées le 18 septembre dernier par la ministre de la Santé. Entre temps, une vaste consultation aura été menée jusqu’au 25 novembre inclus auprès des Français qui auront pu enrichir le projet initial de la stratégie qui devait être adoptée en Comité Interministériel de la Santé avant la fin de l’année écoulée. Cette stratégie, souligne le décret, vise à « contribuer à renforcer l’efficience du système de santé en cohérence avec le plan d’appui à la transformation du système de santé et à garantir la soutenabilité des dépenses de santé, condition du maintien d’un accès de tous à des soins de qualité ». Reste que cette même stratégie devra surtout s’inscrire dans le cadre économique et financier fixé par le gouvernement « en vue de rétablir durablement la situation des finances publiques ». Car Bruxelles n’est pas loin et rappelle volontiers à qui veut l’entendre qu’il faut maîtriser les déficits publics.
Parmi les 4 axes de réflexion retenus pour cette consultation, assortis de 11 domaines d’action prioritaires (1), figure la volonté de « mettre en place une politique de promotion de la santé, incluant la prévention, dans tous les milieux et tout au long de la vie ». L’objectif est ici comme pour les autres pistes arrêtées par le gouvernement d’associer l’ensemble des parties prenantes (usagers, élus locaux et nationaux, associations, entreprises, organismes représentatifs des professionnels et des acteurs de la santé) en amont des décisions. « Les actions de prévention comprennent l’ensemble des actions qui permettent soit de prévenir la survenue des problèmes de santé (prévention primaire), soit de les détecter précocement et d’éviter leur aggravation (prévention secondaire), soit encore de pallier leurs conséquences ou complications (prévention tertiaire) », souligne dans ce registre la ministre de la Santé. Le décret du 31 décembre détaille par le menu les actions que le gouvernement souhaite voir engagées sur le terrain de la prévention.
Clarifier les rôles des acteurs
Invité à émettre un avis (3) sur la mise en œuvre de la politique de prévention et de promotion de la santé, le Haut conseil pour l’avenir de l’assurance-maladie (HCAAM) estime de son côté qu’il faut en la matière engager un « effort de clarification », notamment sur les concepts, les périmètres de compétences, les organisations et les rôles des différents acteurs de la santé. Il invite notamment, comme le préconise l’IGAS dès 2003, à sortir le système de santé d’un mode d’organisation et de financement centré sur le curatif et de reconsidérer l’évolution de la structure des rémunérations des professionnels de santé pour les inciter à s’engager dans le développement des activités de prévention.
Les assureurs complémentaires participent déjà aux actions de promotion et de prévention de la santé de diverses manières, analyse le Haut Conseil. Ils concourent ainsi à la prévention dans une logique à la fois individuelle (auprès de leurs assurés) et populationnelle. Ils accompagnent traditionnellement les pouvoirs publics (aux différents échelons) dans la lutte contre les « fléaux sociaux » et dans la prévention des accidents de la vie. Enfin, ils sont à l’initiative de campagnes d’information et d’éducation pour la santé sur les grands déterminants de la santé des populations (inégalités sociales de santé, alcool, tabac etc.). Il faudra sans doute qu’ils aillent plus loin dans leurs engagements. La question de la suppression des restes à charge en dentaire, optique et audition, devrait à cet égard permettre de savoir ce qu’il en sera sur ce terrain. L’HCAAM note ainsi que dans le champ de l’audition, de l’optique et du bucco-dentaire, les OCAM « couvrent un large spectre d’activités : du dépistage à la prise en charge complémentaire, voire à l’organisation du marché à travers les réseaux de soins ». L’avenir nous dira si ces mêmes organismes complémentaires iront plus loin.
Mieux gérer les risques
Certains OCAM interviennent également dans « l’automédication responsable », en proposant de prendre en charge des dépenses de pharmacie pour des médicaments non prescrits. D’autres mettent en place des services en ligne téléphonique ou des sites internet dédiés à la prévention, pour permettre aux assurés d’obtenir des conseils pour s’orienter efficacement dans le système de santé ou pour mieux se prendre en charge. « La généralisation de la complémentaire d’entreprise portée par l’ANI permet en outre d’envisager une articulation plus forte des efforts de prévention en dehors et à l’intérieur de l’entreprise, dimension essentielle compte tenu de l’importance des problématiques de santé au travail », ajoute le Haut Conseil. C’est dire la multiplicité des interventions des assureurs complémentaires dans le champ de la prévention, par lesquelles ces derniers souhaitent à la fois mieux gérer les risques de leurs assurés et contribuer à refonder les politiques de préventions à venir. Il faudra encore savoir quelle place les politiques à venir accorderont aux assureurs complémentaires et s’ils pourront aller au-delà de leur simple rôle de payeurs, aveugles ou éclairés ?
Jean-Jacques Cristofari
(1) Cf. « Donnez votre avis sur la Stratégie nationale de santé » (2) Cf. « Refonder les politiques de prévention et de promotion de la santé » – HCAAM, Avis du 28 juin 2017.
Journaliste spécialisé en économie de la santé En savoir plus ...