Voté par 67 voix pour et 39 voix contre, avec 1 abstention, le projet de loi de financement de la Sécu (PLFSS) pour 2021 est marqué par l’ampleur inédite du déficit consolidé de l’ensemble des branches des régimes obligatoires de base (y compris le fonds de solidarité vieillesse), attendu à 50,7 milliards d’euros en 2020, contre 1,7 Md€ en 2019. Nous voilà revenu à l’époque du lancinant « trou de la Sécu ».
En pleine crise de la Covid-19, les résultats financiers affichés par le PLFSS pour 2020 n’auront guère fait de gros titres dans la presse nationale. Nous voilà pourtant revenu aux pires heures de la Sécu, à une époque où les « trous » se succédaient sans qu’on ne puisse jamais en voir le fond. Désormais, à elle seule, la branche maladie du régime général devrait atteindre – 33,7 Mds€ en 2020, et serait toujours dans le rouge à – 23,7 Mds€ en 2021. Les recettes – assises pour l’essentiel sur les cotisations sociales et les prélèvements sociaux – ont ainsi fondu comme peau de chagrin et rien ne laisse entrevoir pour le proche avenir qu’elles pourraient remonter pour combler quelque peu le trou.
L’impossible retour à l’équilibre
L’Ondam, sacro saint objectif à ne jamais dépasser, a été corrigé à la hausse à deux reprises pour 2020, et atteint désormais 218,9 Mds€ (+9,2%). Nous sommes ici encore loin des objectifs passés, limités à des + 2 voir +2,5 % quand bien même la croissance « naturelle » des dépenses se situait à plus de 4 %. Il est vrai que l’actuel Ondam intègre une dotation exceptionnelle de 4,8 Mds€ pour Santé publique France (au lieu de 150 millions d’euros initialement) pour ces achats de masques qui ont tant fait défaut dans le passé, ainsi que pour des équipements de protection, respirateurs, réactifs pour les tests PCR, dotation qui inclut 1,5 Md€ au titre des futurs vaccins.
Pour 2021, ce sera cependant le retour au principe de réalité : l’Ondam a été fixé à 225,4 Mds€, ce qui correspond à une hausse évaluée à 2,3 %, et il exige près de 4 Mds€ (3,995 Mds€ précisément) d’économies. Soit un montant quasi-équivalent à celui décidé pour le financement des revalorisations salariales issues du Ségur de la santé (3,4 Md€ en 2020 et 7,4 Md€ en 2021)
« Dans ce contexte, le retour à l’équilibre global du régime général ne serait pas atteint à l’horizon 2024 (-19,4 Mds€), le rebond anticipé ne permettant pas de combler la dégradation observée en 2020« , souligne la nouvelle rédaction de l’annexe B de la LFSS. Ainsi dans quatre ans, le déficit du fonds de solidarité vieillesse (FSV) serait de 0,8 Md€ et le déficit consolidé régime général et du FSV atteindrait ainsi 20,2 Mds€ ». « En 2024, le déficit global pour l’ensemble des régimes obligatoires atteindrait 21,6 Mds€ », est-il ajouté. « Il est indispensable d’amorcer un retour à l’équilibre des comptes de la sécurité sociale dès que la situation économique le permettra« , souligne de son côté le gouvernement. Reste que la crise sanitaire liée à l’épidémie de Covid-19, et celle encore à venir d’une crise économique après le confinement de la population risquent de faire litière aux prévisions gouvernementales. Autant dire que les mauvaises nouvelles sont devant nous.
J-J Cristofari
Journaliste spécialisé en économie de la santé En savoir plus ...