[singlepic id=287 w=320 h=240 float=left]Alors que les dépenses en médicaments remboursés par l’assurance-maladie ne progressent plus que très lentement dans l’Hexagone, à 0,4 % pour le 1er semestre 2011, l’Allemagne enregistre de son côté un vrai effondrement, à – 3,5 % sur la même période. En prix de vente officinal, ces mêmes dépenses pharmaceutiques remboursées s’élèvent à 20 milliards d’euros en France, contre 14,7 milliards – hors vaccins – outre-Rhin. De part et d’autre du Rhin, la tendance est désormais résolument à la baisse. L’économiste Claude Le Pen avance qu’en matière de médicament, la « croissance zéro est programmée » . Analyse.
« Sur les 12 derniers mois, les ventes officinales sur prescription se sont montées à 20 milliards d’euros tout rond, soit une croissance toute ronde également de 0% », explique l’économiste Claude Le Pen dans Ims PharmaNew. Ce premier semestre renoue en quelque sorte avec la tendance observée en juin 2009, où la croissance du marché se situait sur une année pleine à + 0,2 % en prix fabricant HT. Sur l’ensemble des prescriptions délivrées en ville de janvier à mai, celles qui sont issues des cabinets de généralistes dominent le marché (60,6 %), suivies de celles des médecins spécialistes (17,6 %), tandis que l’hôpital est à l’origine de 21,8 % de ces mêmes ordonnances servies en ville. Pour l’économiste de la santé, la lecture du plan d’économies adopté début juillet par le conseil d’administration de la CNAMTS en vue de la prochaine loi de financement de la Sécu pour 2012, – soit 2 milliards d’euros pour tenir l’objectif annuel de dépenses d’assurance-maladie à + 2,8 % -, laisse clairement entendre que le médicament sera de nouveau à la fête en 2012. « Pour 2011, entre les baisses de prix, la maîtrise médicalisée qui porte sur des classes de plus en plus nombreuses (ATB, statines, IPP, IEC et AA2, anxiolytiques et hypnotiques, antiagrégants plaquettaires, antalgiques, antidépresseurs, EPO, anti-TNF alpha, antidiabétiques, ostéoporose) et le renforcement des politiques d’achat des hôpitaux, le médicament contribuait pour près de la moitié à ces économies », commente Claude Le Pen, pour qui ce devrait à nouveau être le cas en 2012. Ainsi si 730 millions d’euros d’économies devront découler, dixit la CNAMTS, pour 2012 de « l’évolution des tarifs des produits de santé » (contre 425 millions en 2011), le médicament devrait subir à lui seul à ce titre une perte de 500 millions d’euros en prix fabricants HT, soit l’équivalent d’un déficit de croissance des produits vendus en ville de l’ordre de 2,5 %. Conclusion : « la croissance zéro est programmée pour 2012 » en France, prognostique l’économiste de Paris Dauphine. Les folles années de progressions à deux chiffres sont désormais derrière nous !
Evolution du marché des médicaments remboursables – Entrées Officine – Prix fabricant HT
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[Source : Gers SAS, le marché pharmaceutique France]
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Un plan drastique de ristournes aux caisses maladie
De l’autre côté du Rhin, le médicament est également à la fête, mais pour des montant d’économies deux fois supérieurs côté fabricants. Car il est depuis des mois l’objet d’un plan drastique de diminution des dépenses qui porte ses fruits. Les rabais ou réductions de prix imposés aux fournisseurs de spécialités pharmaceutiques dans le cadre de la loi AMNOG (2) ajoutés au moratoire sur les prix en vigueur jusqu’en 2013, ont ainsi d’ores et déjà permis de porter les économies sur le médicament à 1,9 milliard d’euros sur le 1er semestre 2011. Depuis 2011, les grossistes répartiteurs sont également soumis à une remise de 0,85 % sur les prix de ventes des laboratoires (rendement pour les caisses : environ 90 millions d’euros pour le 1er semestre). La mesure affecte directement le prix d’achat des produits en officine et donc leur prix de vente. A cet effet « indirect » s’ajoute le rabais que les officines doivent consentir aux caisses maladies publiques, qui a été augmenté de 1,75 euro à 2,05 euros par boite de médicaments prescrits (rendement : 619 millions d’euros). La contribution obligatoire des fabricants, pharmacies d’officine et répartiteurs aux économies recherchées s’élève ainsi à 11 % des dépenses en médicaments du régime général de l’assurance-maladie allemande (GKV), avec une part dominante pour les laboratoires pharmaceutiques (1,135 milliard d’euros).
[singlepic id=289 w=320 h=240 float=left] Effondrement des ventes
Au total, pour ce premier semestre 2012, les dépenses allemandes en médicaments et tests de diagnostic se sont élevées en Allemagne, selon IMS (3) à quelque 14,7 milliards d’euros en prix de vente officine. Comparé au premier semestre 2011, le marché allemand du médicament remboursé s’est est ainsi effondré de – 3,5 %, pour une hausse des ventes en volume de +0,8 %. La tendance était encore plus forte au 1er trimestre 2011, avec un recul de 5 points. Loin de s’infléchir, cette tendance lourde confirme l’observation énoncée plus haut : la croissance zéro est bel et bien programmée sur les marchés leaders du médicament en Europe. De part et d’autre du Rhin, les laboratoires pharmaceutiques sont mis à contribution et la pression qui est exercée sur leur chiffres d’affaires ne devrait pas être sans conséquences, à moyen terme, sur le maintien de leurs productions sur le Vieux Continent. C’est à dire sur leur volonté de délocaliser ces dernières.
Jean-Jacques Cristofari
(1) Numéro 34, en juillet 2011
(2) Loi pour la réorganisation du marché pharmaceutique
(3) « GKV-Ausgaben bei Arzneimitteln im ersten Halbjahr 2011 rückläufig », IMS Allemagne, août 2011