[singlepic id=218 w=320 h=240 float=left]Le 1er juillet prochain, la caisse d’assurance-maladie City BKK, membre du réseau allemand des caisses d’entreprise BBK – ou « Betriebskrankenkassen », au nombre de 120 en Allemagne qui couvrent 13 millions d’assurés sociaux -, fermera définitivement ses portes. Cette faillite est la première depuis l’introduction du nouveau système de financement de la Sécu allemande, avec la création en janvier 2009 par le gouvernement Merkel, du « Fonds de Santé », chargé de couvrir les dépenses des caisses au-delà de ce que leur permettent les prélèvements sociaux, bloqués au taux de 15,5 %. Cette faillite intervient dans un contexte de déficit croissant des comptes de l’assurance-maladie allemande et elle pourrait en augurer d’autres.
Rien ne va plus au pays de Otto von Bismarck, chancelier fondateur de la Sécu allemande. Au 1er juillet prochain, pour la première fois depuis l’introduction de la loi pour le renforcement de la concurrence dans l’assurance-maladie légale (1), une caisse maladie membre de l’influent réseau des BKK – ou Betriebskrankenkassen – va fermer ses portes. L’affaire a fait grand bruit outre-Rhin, tant elle semblait impossible depuis la création en janvier 2009 d’un Fonds de Santé, censé précisément permettre de compenser l’insuffisance en recettes de certaines caisses maladie, en particulier celles qui ont en charge des assurés sociaux âgés et malades chroniques, c’est à dire à fort coûts. Par ce nouveau système de financement, les caisses qui reçoivent les cotisations d’assurance-maladie (bloquées au plan fédéral à 15,5 % et partagées à hauteur de 7,3 % pour les employeurs, à 8,2 % pour les assurés, dont 7,3 % + une contribution supplémentaire de 0,9 % à charge des seuls salariés) doivent reverser les sommes perçues au Fonds de Santé, ce dernier étant alors chargé de refinancer le système selon les risques couverts par les différentes caisses maladie. Très critiqué outre-Rhin, ce mode de financement dual a, dans l’esprit du législateur, pour objectif principal de geler les cotisations maladie afin de renforcer la compétitivité des entreprises allemandes à l’international. Si cet objectif premier a bel et bien été atteint, tout comme le second, le nouveau système n’a pas empêché pour autant les dépenses maladie de s’envoler.
Déficit prévu avec explosion des coûts
La faillite de la City BKK illustre cette nouvelle donne, qui veut que nos voisins ont de plus en plus de mal à faire face à l’envolée de dépenses maladie, essentiellement dues au vieillissement de leur population et à l’explosion des maladies chroniques. Pour l’année en cours, le déficit annoncé de -0,4 milliards d’euros pour la seule branche maladie (après des excédents de 1,4 en 2009 et 2008, de 1,7 en 2007), devra être compensé par de nouveaux apports des Allemands à leurs assurances. Doris Pfeiffer, présidente de l’association centrale de l’assurance maladie légale qui regroupe toutes les caisses maladie publiques a d’ores et déjà fait savoir que les Allemands devront dans les années à venir payer des contributions additionnelles à leurs cotisations de 50 à 70 euros. Les caisses ayant à régler des coûts supplémentaires pour les médecins, les hôpitaux et les médicaments, « une telle ampleur de hausse est possible et souhaitée par la classe politique », a souligné la représentante des caisses. Car la tendance relevée en 2010 du côté des soins ambulatoires, en hausse de 10,9 %, comme des soins hospitaliers, en croissance de 4,7 % à l’identique de celle des dépenses maternité, devrait se poursuivre cette année et plomber un peu plus encore les comptes des caisses, placées de facto dans l’impossibilité d’augmenter leurs cotisations, comme elles le faisaient dans le passé.
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[singlepic id=220 w=320 h=240 float=left]Frank Michalak, patron de la caisse AOK Nord Est, considère que la faillite de la City BKK a pour l’essentiel été due à un dysfonctionnement du Fonds de Santé, qui, en transférant avec retard aux caisses allemandes les sommes allouées pour leurs nouveaux assurés, placent ces dernières dans des situations financières difficiles. City BKK avait, en son temps réagi, en augmentant les participations de ses assurés de 15 euros par tête, mais ce ballon d’oxygène ne lui permit pas de sortir de l’ornière. « Le gouvernement fédéral devrait s’assurer au minimum que l’argent du Fonds de Santé arrive là où il est attendu – chez les personnes âgées et les malades -« , ajoute Frank Michalak. Pour l’heure, le Fonds couvre bien les coûts occasionnés par ces groupes d’assurés, mais souvent pas complètement. C’est une des questions qui a causé la perte de la City BKK (170 000 adhérents) – qui coûtera de 15 à 17 millions d’euros au réseau repreneur BKK – et qui pourrait causer celle de 23 autres caisses publiques dont l’activité est considérée à ce jour comme menacée.
Jean-Jacques Cristofari
(1) Gesetz zur Stärkung des Wettbewerbs in der gesetzlichen Krankenversicherung (GKV-WSG), adoptée le 2 février 2007
Journaliste spécialisé en économie de la santé En savoir plus ...