by Jean Jacques Cristofari | 9 février 2013 11 h 08 min
[singlepic id=670 w=320 h=240 float=left]Alors que le marché du médicament accuse l’an passé un net recul en France, à – 2,5 %, prémisse d’une entrée en récession de la branche, les ventes de spécialités pharmaceutiques continuent de croître en 2012 en Allemagne, de 1,5 %. L’industrie du médicament y a cependant payé un lourd écot à l’assurance maladie obligatoire, qui est loin d’afficher outre-Rhin les déficits abyssaux de l’Hexagone.
C’est la soupe à la grimace dans les rangs de l’industrie pharmaceutique française. Pour la 3ème année consécutive, le marché français du médicament, incluant les produits présentés au remboursement de l’assurance-maladie et les non remboursables, accuse en 2012 un nouveau recul, à -2,5 %, selon le GERS, pour atteindre 20,9 milliards d’euros. La forte pression sur les prix des spécialités n’est pas étrangère à ce que les économistes qualifient désormais d’entrée en récession de la branche du médicament. Les grandes classes de produits ayant subi des baisses ont ainsi contribué, toujours selon le GERS, pour quelque 735 millions d’euros aux économies réalisées. De leur côté, les pertes de brevet des grandes molécules – les blockbusters – auront en année pleine coûté 482 millions d’euros de manques à gagner dans les rangs des laboratoires. Enfin, les déremboursements de spécialités du mois de mars 2012 (Tanakan®, Vastarel® et Gé, Vitaloginik®, Abufene®…) , auront également coûté 125 millions d’euros aux mêmes laboratoires. De son côté, l’accord « tiers-payant contre génériques », entré en vigueur l’été 2012 et visant à faire remonter le taux de substitution des génériques (objectif fixé à 85 %) aura également eu un impact certain sur le chiffre d’affaire de la branche, estimé à 1,5 milliard d’euros par le GERS pour des économies dans les caisses de la Sécu de l’ordre de 421 millions. les ventes de génériques sont les seules à croître, à + 10 % pour atteindre un total de 5,235 milliards d’euros. L’hôpital, qui assurait l’essentiel de la croissance du marché du médicament ces dernières années, n’est pas davantage à la fête : en 2012, le chiffre d’affaires des médicaments rétrocédables et hors GHS a chuté de -1,2 % à 3,625 milliards d’euros. Cette évolution négative du marché hospitalier est due à des baisses de prix (- 188 millions d’euros pour les antinéoplasiques, les facteurs de coagulation, les EPO et les anti TNF) auxquelles se sont ajoutées des radiations de la liste des hors GHS (Taxotere, Hexvix, Faslodex …) pour un montant de 101 millions d’euros. Pour le GERS, l’année qui vient de s’ouvrir sera placée sous le signe de la rigueur, avec des mesures d’économies sur les soins de villes qui s’élèveront à 1,150 milliard d’euros, comme sur l’hôpital, pour 110 millions supplémentaires. Le marché devrait une nouvelle fois être à la baisse, estimée par le GERS à – 3,3 % pour les seuls médicaments remboursés. Cette baisse s’inscrit dans la commande inscrite au coeur de la loi de financement de la Sécu pour 2013, qui vise à maintenir l’Objectif national des dépenses de santé (ONDAM) autour de 2,7 % (175,4 milliards de dépenses remboursées) avec des économies supplémentaires annuelles de l’ordre de 2,5 milliards d’euros.
[Source : GERS, Tableau de bord décembre 2012]
L’Allemagne s’offre 23,5 milliards d’euros de réserves financières
De l’autre côté du Rhin, les industriels du médicament présentent un bilan plus favorable, entaché cependant des fortes ristournes concédées par ces derniers à l’assurance maladie obligatoire. Ainsi les ventes de spécialités pharmaceutiques et de tests pour diagnostics se sont élevées l’an passé, selon IMS, à quelque 29,4 milliards d’euros (en prix publics officine, hors vaccins). Soit une hausse de 1,5 % (443 millions d’euros) par rapport à 2011. En volume, c’est à dire en nombre de boîtes vendues, le marché accuse cependant une légère baisse (-0,1 % pour 677 millions de boîtes). Outre-Rhin, les ventes de grands conditionnements – adaptés aux malades chroniques – ont ainsi marqué la tendance, avec une hausse de 3,7 %, encouragée par l’assurance maladie et sa politique de rabais obligatoire. Cette dernière aura cependant coûté près de 4 milliards d’euros aux acteurs de la chaîne du médicament : les laboratoires auront ainsi ristourné aux caisses publiques quelque 2,5 milliards d’euros – et 440 millions aux assureurs privés -, et les officines auront du ristourner pour 1,252 milliard d’euros.
Ces rabais obligatoires, imposés depuis des années aux acteurs du médicament, auront largement contribué au redressement des comptes de l’assurance maladie légale – c’est à dire publique – allemande. Sur les trois premiers trimestres de l’année 2012, cette dernière affichait ainsi un excédent de 4,05 milliards d’euros[1], pour des dépenses évaluées à 138 milliards d’euros. [singlepic id=669 w=240 h=160 float=right]La réforme introduite en Allemagne avec la création, en février 2007, d’un « Fond de santé » (Gesundheitsfond[2]), qui a permis de bloquer les taux de cotisations des Allemands à leur Sécu à 15,5 %, a ainsi permis de redresser les comptes de la santé, en générant notamment des réserves financières qui s’élèvent en 2012 à un total de quelque 23,5 milliards d’euros. Nous sommes, outre-Rhin, loin, très loin, des déficits engrangés par la France depuis 2007 (1). Il est vrai que le « modèle social allemand » défendu par Angela Merkel (photo) s’assoit largement sur une croissance sans pareil en Europe !
Jean-Jacques Cristofari
(1) Selon le Sénat[3], le déficit cumulé de la Sécu s’élève à 160 milliards d’euros pour la période 2002-2012, soit environ une année de dépenses d’assurance maladie
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