2017 affiche le plus faible déficit annuel du régime général de la Sécurité sociale depuis 15 ans. La bonne nouvelle est due à une reprise de la croissance de la masse salariale et donc des cotisations, ainsi qu’à une bonne maîtrise des dépenses d’Assurance-maladie. Va-t-on pour autant vers un redressement durable des comptes de la Sécu ?
Une hirondelle fera-t-elle le printemps de la Sécu ? A la lecture des derniers chiffres sur les comptes de la Sécu, communiqués le 15 mars, il y a tout lieu de le penser. C’est donc une première depuis 14 ans : le solde du régime général de la sécurité sociale et du fonds de solidarité vieillesse s’établit à fin 2017 au niveau le plus bas enregistré sur la période, à – 5,1 milliards (cf. Tableau ci-dessous), en baisse de 2,7 milliards par rapport à 2016, année pour laquelle il se situe à -7,8 milliards d’euros. « Ce résultat est en légère amélioration par rapport à l’objectif rectifié dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 (-5,2 milliards) », se félicitent en chœur Agnès Buzyn et Gérald Darmanin lors de la présentation des comptes.
Fin des déficits excessifs
« Ces bons résultats confortent la perspective de sortie de la France de la procédure de déficit excessif dès 2017 et plus globalement notre stratégie de redressement des finances publiques, notent encore les deux ministres. Ils nous permettent d’envisager un retour à l’équilibre des comptes de la Sécurité sociale dans un avenir proche, alors que notre système est en déficit depuis 2001. Cette étape nous conforte dans notre politique de redressement de nos comptes publics, et nous encourage à poursuivre et amplifier les efforts de maîtrise de la dépense publique tout au long du quinquennat », ajoute encore ces derniers.
Pour autant, la tendance à la résorption déjà été inscrite sur la feuille de route du précédent gouvernement, dont la ministre de la Santé, Marissol Touraine se félicitait en son temps d’avoir ramené le déficit du régime général à 3,7 milliards d’euros en fin 2016 et annonçait même un retour à l’équilibre pour fin 2017. « En 2017, avec 400 millions d’euros seulement de déficit sur près de 500 milliards d’euros de dépenses, il n’y aura plus de » trou de la sécu » », avançait cette dernière avec optimisme en septembre 2016, lors de réunion de la Commission des Comptes de la Sécu. La « tendance » vers la retour à l’équilibre était donc bien inscrite sur la feuille de route des précédents gouvernements. Il importe désormais qu’elle devienne une réalité !
La santé joue les arbitres
Les Français, et en particulier les jeunes générations d’actifs appelés à payer la note de la CADES (plus de 100 milliards de dettes reportées) connaîtront-ils bientôt le retour tant espéré à l’équilibre des comptes de la protection sociale. Avec les premiers signes tangibles de reprise économique, la croissance de la masse salariale est repartie à la hausse (+3,5 % selon l’ACOSS). Ajoutée à d’autres assiettes, le surcroît de recettes enregistrées a été de 1,2 milliards d’euros pour le budget 2017 de la Sécu. Un résultat qui aurait pu être majoré d’un milliard supplémentaire si des ressources antérieurement affectées à l’Assurance-maladie n’avaient pas été récupérées par l’ACOSS.
Au total, la branche famille se solde presque à l’équilibre (- 200 millions d’euros). La branche retraite enregistre un déficit de 1,1 milliard d’euro, qui passe ainsi sous la barre des 3 milliards pour la première fois depuis 5 ans. La branche maladie « stabilise » son déficit à 4,9 milliards, malgré la perte précitée de TVA. Seule la branche AT-MP demeure en excédent, de + 1,1 milliard.
Il reste désormais à vérifier en juin prochain si cette tendance au redressement des comptes sera durable et si la perspective d’une sortie définitive de 15 années de déficits cumulés pourra s’imposer. L’annexe au projet de loi de Finances pour 2018 (1), publiée en septembre dernier fait, état de recettes fiscales prévisionnelles de 200,938 milliards d’euros au bénéfice de la protection sociale, soit 22,8 milliards de plus qu’en 2017 et 24,98 milliards de plus qu’en 2016. La branche maladie, dont la ministre de la Santé disait récemment qu’elle supportait 35 milliards de dépenses « inutiles », jouera dans ce cadre les arbitres. Mais la branche retraite pourrait de son côté jouer à nouveau les troubles fêtes avec les nouvelles générations d’entrants. Le retour à l’équilibre s’avère au total un exercice d’équilibrisme bien dosé où une simple défaillance – panne de croissance, crise financière – peut remettre brutalement en cause les figures imposées attendues.
Jean-Jacques Cristofari
(1) Source : Annexe au projet de loi de finances pour 2018[1]. « Bilan des relations financières entre l’Etat et la protection sociale », Annexe 1 : Liste et rendement des prélèvements fiscaux bénéficiant aux organismes de protection sociale. Page 40