by Jean Jacques Cristofari | 14 décembre 2010 16 h 42 min
Les pharmaciens d’officines viennent tout juste de voter pour la formation des Unions régionales de professionnels de santé (URPS). En lice, trois syndicats d’officinaux (FSPF,USPO,UNPF), qui ont fait valoir des analyses et des stratégies différentes[1] pour l’avenir du réseau. En toile de fond une économie officinale qui subit les contre coups de la décroissance générale du marché pharmaceutique, effet d’une générication galopante des blockbusters comme des déremboursements qui se succèdent à vive allure depuis 2 ans.
Le marché officinal a visiblement mangé son pain blanc. Pour la 2ème année consécutive, le chiffre d’affaire global du marché pharmaceutique français inscrit son évolution dans un schéma qui se rapproche de la décroissance, avec un timide + 0,3 % en cumul mobile sur les 9 premiers mois de 2009, suivi d’un non moins timide + 0,4 % sur la même période de l’année en cours. De 33,77 milliards d’euros l’an passé, le CA global de la pharma française sera donc passé à 33,9 milliards (en prix publics HT), offrant ainsi peu de perspective à un univers officinal qui, de l’avis des syndicats, a perdu quelque 270 millions d’euros de marge sur les 4 dernières années. Sur son CA total, la plus forte part revient aux spécialités dotées d’une AMM (26,9 milliards d’euros), suivis des produits à avec AMM, mais non remboursables (2,5 milliards), des produits dits de médication familiale, sans AMM, remboursable (2 milliards d’euros) et enfin des produits de conseil officinal non remboursés (2,5 milliards). Seules ces deux dernières catégories de produits ont connu une légère progression par rapport à 2009, du fait de leur sortie en libre accès dans l’officine rendue possible l’an dernier. Reste qu’en terme d’unités vendues, le premier marché de l’officine, le remboursable prescrit, est en recul de 2,481 à 2,471 milliards d’unités dispensées. La générication des grandes molécules ayant commencé à produire ses effets, ajouté à la baisse des prix de certains produits, voire au déremboursement d’autres, nous assistons ainsi à une croissance du marché quasi nulle, rapporte Pascal Voisin, directeur Consumer Health chez IMS Health.
Descente aux enfers
« Affaibli à la ville, le marché reste maintenu par l’hôpital », poursuit ce dernier. Dans ce dernier secteur, sa progression est de + 7,7 % en 2009, contre + 5,6 % l’an passé sur la période considérée plus haut, le marché hospitalier progressant ainsi de 4,900 milliards d’euros à quelque 5,3 milliards, alors que les ventes en villes régressent de – 1,4 %, de 22,88 milliards en 2009 à 22,54 en 2010. Une descente aux enfers de la ville qui ne fait pas l’affaire des officinaux qui auront ainsi perdu plus de 300 000 euros de ventes sur les 9 premiers mois de l’année qui s’achève et sans doute plus d’ici la Saint Sylvestre.
Autre fait marquant qui affecte très directement le monde officinal, les prescriptions des généralistes auront diminué d’environ 400 millions d’euros sur les trois premiers trimestres de l’année 2010. Un montant contrebalancé par une hausse équivalentes des prescriptions hospitalières (380 millions), qui ne profite pas au réseau officinal, à l’exception des produits qui sortent de la réserve hospitalière. A total, les pharmaciens d’officine auront sur l’année 2010 subit les effets combinés de plusieurs tendances fortes qui ne jouent pas en leur faveur. Avec une part croissance de leur CA liée aux produits remboursables, les baisses des prix, la générication croissante des grandes molécules ou le déremboursement de produits sont autant de facteurs qui fragilisent leur économie. Ajouté à une baisse des ventes des médicaments non-remboursables, leur avenir s’assombrit considérablement. Autant de raisons qui ont conduit les syndicats de la branche à réclamer des mesures fortes. Faute de les obtenir, des officines pourraient fermer en nombre croissant dans les mois qui viennent (près de 800 ont déposé leur bilan en 2010) et fragiliser un peu plus le réseau, qui subit déjà les effets de la baisse du nombre de médecins – et donc des prescriptions – dans certaines régions. Comme d’autres secteurs d’activité, le monde officinal devra faire face à ces nouvelles donnes et se doter d’un « plan Marshall » à la hauteur des enjeux du moment.
Jean-Jacques Cristofari
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