by A-L. Berthier | 5 avril 2014 18 h 36 min
[singlepic id=901 w=300 h=220 float=left]L’engouement pour les sociétés de biotechnologie française ne se dément pas. Depuis l’arrivée, fin 2013, de fonds américains spécialisés dans le capital de DBV Technologies, d’Erytech Pharma, de Genfit et d’Innate Pharma, les investisseurs internationaux continuent à répondre présents aux augmentations de capital et aux introductions en Bourse qui se succèdent ces dernières semaines.
Quatre sociétés françaises viennent de finaliser des augmentations de capital conséquentes. La plus importante est à inscrire au crédit de Transgene. L’opération, annoncée en février, prévoyait initialement une levée de 45 millions d’euros via l’émission de 4,5 millions d’actions et incluait la possibilité de procéder ensuite à un placement privé pour un maximum de deux millions d’actions pour répondre aux demandes manifestées par plusieurs investisseurs institutionnels américains. L’offre a été sur-souscrite, permettant ainsi à Transgene de réunir 65,5 millions d’euros. La société dispose maintenant d’une trésorerie de 100 millions pour financer ses activités sur les 12 prochains mois et soutenir la préparation des études de phase 3 pour ses candidats les plus avancés TG4010 et Pexa-Vec.
Chez Nanobiotix, la clause d’extension, à hauteur de 15 % de l’offre initiale, a pu être exercée, permettant une augmentation de capital[1] de 28 millions d’euros pour financer les phases finales de développement de son principal produit, le NBTXR3[2], et les possibilités d’élargissement de ses indications dans le cancer du foie et dans le cancer de la tête et du cou (BioPharmAnalyses n°50). Parallèlement, quelques uns des principaux investisseurs américains du secteur santé et biotech, Orbimed, venBio, Ridgeback Capital Management LLC, Aquilo Capital Management et Merlin Nexus, viennent de faire leur entrée au capital de Cellectis. Orbimed, qui a conduit l’opération, a déjà investi dans Innate Pharma[3] en novembre dernier. L’augmentation de capital[4] qui atteint 20,52 millions d’euros va permettre à Cellectis de soutenir ses activités dans le domaine de l’immunothérapie adoptive et de développer son portefeuille de produits pour le traitement de leucémies et de tumeurs solides. Un premier partenariat majeur a déjà été mis en place au début de l’année avec le groupe Servier pour le développement d’un portefeuille de cinq produits d’immunothérapie anticancéreuses (BioPharmAnalyses n°51). Enfin, Hybrigenics vient de finaliser une levée de 6,1 millions d’euros pour financer deux nouvelles études de phase 2 de l’inécalcitol dans la leucémie myéloïde aiguë et la leucémie myéloïde chronique. Une étude de phase 2 est déjà en cours dans la leucémie lymphoïde chronique, indication pour laquelle l’inécalcitol[5] dispose du statut d’orphelin en Europe.
Nouveaux partenariats
[singlepic id=840 w=220 h=140 float=left]Du côté des introductions en Bourse, Oncodesign vient aussi de bénéficier de cette fenêtre particulièrement favorable pour la biotech française. La société qui a lancé l’opération début mars visait à lever 11,5 millions d’euros (BioPharmAnalyses n°54). Au final, la levée atteint 12,8 millions d’euros, avec une offre sur-souscrite 2,5 fois et un prix unitaire fixé dans le haut de la fourchette envisagée, à 7,34 euros. A l’issue de ce placement réalisé auprès d’investisseurs français et internationaux et de particuliers, la capitalisation boursière d’Oncodesign ressort à 44,5 millions d’euros et les premières négociations des actions interviendront à partir du 2 avril 2014. Avec cette opération, Oncodesign prévoit d’accélérer ses développements dans trois directions. Alors que son activité s’est d’abord centrée sur l’évaluation préclinique en oncologie pour le compte de la pharma et de la biotech, la société veut renforcer cette activité aux Etats-Unis en y déployant son offre commerciale avec un partenaire américain. Des discussions sont en cours et Oncodesign ambitionne ainsi de faire passer de 20 % à 60 % la part du chiffre d’affaires de son activité Services réalisée aux Etats-Unis. Par ailleurs, la société qui s’est engagée depuis 2008 dans la découverte de médicaments veut développer et renforcer son porte-feuille. A partir d’une approche basée sur la technologie Nanocyclix dédiée à l’identification d’inhibiteurs de kinase spécifiques et sur la validation et la caractérisation précoce de couples molécule/cible, Oncodesign est maintenant à la tête de sept programmes de R&D. Trois d’entre eux sont menés avec des groupes pharmaceutiques (Ipsen[6], Sanofi[7] et UCB[8]) pour des indications hors oncologie, axe dans lequel la société souhaite mener de nouveaux partenariats. Les capitaux levés seront aussi utilisés pour poursuivre le développement de ses propres programmes en oncologie (glioblastome, cancer du pancréas, cancer des ovaires) jusqu’en fin de phase 1/2a avant de les licencier. Avec une collection de 5000 inhibiteurs de kinase qualifiés, les opportunités de développement et de partenariat ne devraient pas manquer à Oncodesign…
Deux spin-off de Pasteur vers la Bourse[singlepic id=902 w=280 h=200 float=right]
Maintenant, les prochains résultats attendus sont ceux de deux sociétés issues de l’Institut Pasteur, Genticel et de Genomic Vision qui ont lancé leur introduction pendant la deuxième quinzaine de mars et de TxCell[9],spin-off de l’Inserm, qui vient tout juste d’initier la sienne. Spécialisée dans la détection des réarrangements génomiques pour le diagnostic de maladies génétiques et de cancers, Genomic Vision exploite une technologie dite de « peignage moléculaire » basée sur l’étirement des fibres d’ADN sur des lamelles de verre pour visualiser des variations structurales du génome. Un premier test destiné à la détection d’une forme de myopathie, la dystrophie facio-scapulo-humérale, est déjà commercialisé depuis l’année dernière en France et aux Etats-Unis dans le cadre du partenariat de Genomic Vision avec le groupe américain Quest Diagnostic. Quatre autres tests destinés notamment au cancer du sein et au cancer du colon devraient également être mis sur le marché en 2015. Ici, l’objectif est de lever de 20 à 26,4 millions d’euros pour établir une structure technico-commerciale et développer ses ventes en Europe. Les fonds levés auront également vocation à soutenir les efforts de R&D de la société pour l’amélioration de sa plateforme technologique et le développement de nouveaux tests. Déjà actionnaire de la société française, Quest Diagnostic s’est engagé à souscrire pour deux millions d’euros tandis que l’autre actionnaire historique de Genomic Vision, le fonds de capital-risque luxembourgeois Vesalius Biocapital Holdings a prévu de contribuer à hauteur d’un million d’euros. Chez Genticel, que son président Benedikt Timmerman présente comme une société « centrée sur l’éradication de l’infection par les papillomavirus avant le développement d’un cancer du col de l’utérus », l’entrée en Bourse vise à lever jusqu’à 39,7 millions d’euros grâce à l’émission d’un maximum de 5,8 millions d’actions nouvelles à un prix unitaire proposé dans une fourchette de 6,75 à 8,25 euros. Alors que son produit d’immunothérapie ProCervix® est en mesure de se positionner comme le premier traitement permettant d’intervenir avant l’apparition de lésions de haut grade ou de lésions cancéreuses chez les femmes infectées par des HPV de type 16 et/ou 18, les résultats déjà obtenus en phase I montrent que celui-ci a permis d’induire une réponse immunitaire spécifique chez 62 % des patientes. De plus, la réponse immunitaire induite est durable, puisqu’après 12 mois de suivi, 89 % des patientes traitées n’ont pas été réinfectées. L’introduction en Bourse vise maintenant à soutenir la poursuite du développement clinique de ProCervix®, en particulier l’étude de phase II[10] en Europe et le lancement prévu en 2015 d’une étude de phase I. Sont également prévus l’entrée en clinique d’un autre produit d’immunothérapie doté d’un spectre d’action plus large, le Multivalent HPV qui cible six types différents de papillomavirus, ainsi que l’élargissement du champ d’application de sa plateforme Vaxiclase. Dérivée de la plateforme CyaA issue de l’Institut Pasteur, cette plateforme permet d’utiliser des antigènes de plus grande taille ou des antigènes multiples (jusqu’à 400 acides aminés au lieu de 100 avec la plateforme CyaA). Les indications ciblées concernent en particulier les cancers et les maladies infectieuses.
34 plans de reconquête industrielle
Enfin, la toute dernière à se lancer est active dans les domaines de l’immunothérapie. La niçoise TxCell a ainsi fait le choix d’ « éduquer ex vivo les lymphocytes T régulateurs (T reg) » pour le traitement des maladies inflammatoires et auto-immunes chroniques. A partir d’un prélèvement de sang réalisé chez le patient, les lymphocytes T sont stimulés par l’addition d’un antigène présent au niveau du site d’inflammation, puis les Treg activés sont sélectionnés et multipliés in vitro avant d’être réinjectés au patient. Un premier produit Ovasave® a finalisé une étude de phase 1/2a[11] pour le traitement de la maladie de Crohn chez des patients qui échappent aux traitements. La société prévoit maintenant de débuter au 2ème semestre un essai de phase IIb dans cette même population de patients dans six pays européens (Allemagne, Autriche, Belgique, France, Italie et Royaume-Uni). Il est également à noter que TxCell possède ses propres installations de production. Situées dans les locaux de l’Établissement Français du Sang (EFS) de la région Bourgogne Franche-Comté, celles-ci ont obtenu le statut d’établissement pharmaceutique en décembre dernier, ouvrant ainsi à TxCell la possibilité, à terme, de proposer des prestations de fabrication à façon pour des produits de thérapie cellulaire. Enfin, la société vient tout juste de signer un accord avec Ferring International, accord qui octroie au groupe suisse une option pour l’acquisition d’une licence exclusive et mondiale pour le développement, la production et la commercialisation d’Ovasave®, pour le traitement des maladies inflammatoires chroniques intestinales (MICI), dont la maladie de Crohn et la colite ulcéreuse. L’accord prévoit un financement pouvant atteindre jusqu’à 73 millions d’euros ainsi que des redevances sur les ventes futures du produit. Comme pour Genomic Vision et Genticel, plusieurs actionnaires de TxCell dont Auriga Partners et Seventure Partners ont annoncé leur souscription à l’offre. Avec l’apport de huit millions annoncé par Bpifrance, la moitié environ de l’augmentation de capital, soit 12 millions d’euros est d’ores est déjà couverte. Un montant significatif au moment où le plan Biotechnologies médicales[12] « l’humain réparé » qui figure parmi les 34 plans de reconquête industrielle initiés en septembre dernier a justement choisi de mettre l’accent sur les thérapies cellulaires…
Anne-Lise Berthier
Rédactrice en chef de BioPharmanalyses[13]
Source URL: https://pharmanalyses.fr/les-biotech-ont-la-cote-en-bourse/
Copyright ©2024 PharmAnalyses unless otherwise noted.