Espagne : Les régions doivent 6,4 milliards d’euros à l’industrie pharma

by Jean Jacques Cristofari | 27 janvier 2012 17 h 53 min

[singlepic id=375 w=320 h=240 float=left]Alors que l’Espagne sombre dans une nouvelle et profonde crise économique avec un chômage qui frappe 5,3 millions de personnes (23 % des actifs), l’organisation représentative des industriels du médicaments basés en Espagne indique que les 17 régions que compte le pays doivent en fin 2011 quelque 6,4 milliards d’euros à ces mêmes laboratoires. Une dette qui n’a fait que croître au fil des mois, avec pour risque majeur de voir les Big Pharma ne plus livrer leurs produits voire se désengager du pays.

Alors que plusieurs dizaines de milliers de fonctionnaires manifestaient cette semaine dans l’Est de l’Espagne pour protester contre les coupes budgétaires décidées par la région de Valence, très endettée, l’organisation représentative des laboratoires pharmaceutiques installés en Espagne, Farmaindustria, vient de faire savoir à Madrid que les 17 régions espagnoles, qui ont en charge les budgets de la santé et de l’éducation sur leur territoire, devaient fin 2011 près de 6,4 milliards d’euros à l’industrie pharmaceutique pour les médicaments vendus et livrés aux hôpitaux. Soit une dette supérieure à l’ensemble du chiffre d’affaire annuel de la pharma française avec les hôpitaux de l’Hexagone. En mars 2011, il y a presque un an, la note s’élevait à 5,191 milliards d’euros, pour grimper quelques mois plus tard à 5,4 milliards. Les retards de paiement étaient alors, en moyenne, d’un an et deux mois, mais certaines régions mettent presque deux ans et demi avant de régler leurs factures : certains hôpitaux de Castille-Léon ont des retards supérieurs à 900 jours et les communautés autonomes d’Andalousie, de Valence et de Castille-La Manche affichent plus de 600 jours de retards, fait savoir à l’époque Farmaindustria. La situation ne s’est guère améliorée avec le temps et certains laboratoires européens, tel Roche se sont émus d’une situation qui n’a rien de normal. « Ces délais dépassent largement ceux autorisés par la loi », fait alors savoir le Suisse, en négociation depuis des mois avec les communautés autonomes et qui a décidé de ne plus fournir certains hôpitaux de la Péninsule.

Menaces de faillites[singlepic id=374 w=320 h=240 float=right]

Tandis que le pays sombre dans la banqueroute avec des créances douteuses assises sur des crédits immobiliers irrécouvrables (134,1 milliards d’euros fin novembre, soit 7,51 % du total des créances), voici la pharma espagnole qui fait purement et simplement les fins de mois, pour ne pas dire de semestre, des régions. Plus grave, la hausse importante de la dette (36 %) va de pair avec une stagnation des ventes aux hôpitaux (1,1 % en 2011), « ce qui signifie qu’elle est due à la chute dramatique des paiements de la part des régions et non à de nouveaux achats, souligne Farmaindustria, présidé par Humberto Arnés (photo). Quant aux délais de règlement, ils se situent désormais à plus d’un an (525 jours en moyenne), voire pour quatre régions à plus de 800 jours. Pour assainir leurs finances publiques et des déficits incontrôlés, quasiment toutes les régions envisagent de déduire d’environ 10% les coûts de fonctionnement de leur administration. Mais il leur faudra aussi éteindre l’ensemble de leurs dettes, dont celle de la pharma.

L’Andalousie, avec une dette de 1,5 milliard (+42,5% en un an), la région de Valence, qui doit 1,3 milliard (+57,9%) et celle de Madrid, dont la facture impayée atteint 762 millions (+19,1%), se situent parmi les plus mauvais payeurs. L’éclatement de la bulle immobilière explique pour l’essentiel la situation financière des régions : au troisième trimestre 2011, leur dette cumulée s’élève à 135,2 milliards d’euros, un record historique. Conséquence de cette situation inédite en Europe : la quasi totalité des 2.400 pharmacies de la communauté de Valence a fermé boutique plusieurs jours en décembre pour dénoncer les dettes impayées de la région. Le réseau officinal espagnol est ainsi lui-même menacé de faillites en chaînes. Les ruptures d’approvisionnement pourraient également se manifester dans un proche avenir, ruptures qui inquiètent Famaindustria.

Jean-Jacques Cristofari (d’après AFP)

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