by Jean Jacques Cristofari | 27 octobre 2020 12 h 16 min
Ce mardi 27 octobre aura lieu le vote solennel sur le Projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2021 à l’Assemblée nationale. Le texte et ses 51 articles, qui fixe les tables des comptes de la Sécu, vont faire la navette au Sénat avant une adoption définitive. Sur l’ensemble, les comptes présentés traduisent l’impact de la crise pandémique sur les comptes sociaux.
« Gérer la crise sanitaire, adapter notre système de santé et octroyer de nouveaux droits sociaux ». c’est sur la base de ce triptyque que le gouvernement a présenté le 7 octobre aux députés la maquette de son projet de loi de financement de la Sécu pour 2020. « Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2021 traduit l’action du Gouvernement pour répondre à la crise sanitaire et économique, indique le communiqué du Conseil des ministres. Ce dernier souligne alors qu’en 2020, 15 milliards d’euros de dépenses exceptionnelles ont été engagées par l’assurance maladie pour répondre à la crise sanitaire (achats de masques, prise en charge des tests, investissement dans les hôpitaux et établissements médico-sociaux pour la réorganisation des soins, primes pour la reconnaissance des soignants). Les personnels des établissements de santé et des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) bénéficieront de 8,8 milliards d’euros supplémentaires au titre des revalorisations de salaires. Toujours du côté de l’hôpital, ses modes de financement seront appelés à évoluer « en poursuivant la réforme de la tarification hospitalière ». Des nouveaux droits seront créés et la nouvelle branche pour le soutien à l’autonomie sera consacrée par la future loi de financement.
Mais la toile de fond de ce PLFSS pour 2020 est sombre : « La progression des dépenses d’assurance maladie sans précédent pour répondre aux besoins exceptionnels de la crise et aux décisions structurelles en faveur du secteur hospitalier se traduisent par une dégradation de la trajectoire des finances sociales », note encore le gouvernement. Car pour l’année qui s’achève, le régime obligatoire de base accusera une déficit de 42,9 milliards d’euros, et la branche maladie un trou de 29,8 milliards d’euros. Et pour amortir la dette qui enfle, la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) enregistre un objectif d’amortissement de la dette sociale fixé à 15,9 milliards d’euros. Du jamais vu ! Nous sommes loin, très loin des 1,9 milliard de déficit (régime général + fonds de solidarité vieillesse FSV) atteints fin 2019, année qui devait marquer le retour à un équilibre vertueux des comptes de la Sécu.
L’ONDAM explose
Côté dépenses, l’Objectif national des dépenses d’Assurance-maladie arrêté fixe un nouveau cap : son montant pour 2020 était fixé à 205,6 milliards d’euros par la LFSS pour 2020. Le présent PLFSS corrige les chiffres à hauteur de 215,7 milliards d’euros, soit une évolution de 7,6 % au lieu des 2,45 % prévus initialement dans l’ancienne loi de financement. Dans les faits, nous assistons à ce que les parlementaires ont toujours refusé de faire ces années écoulées : considérer que l’ONDAM doit traduit une évolution « réelle » des dépenses de santé et non une progression souhaitée en vue de maîtriser, sinon de réduire, les dépenses. « Cette majoration de 10,1 milliards d’euros s’explique par des surcoûts exceptionnels liés à la crise sanitaire à hauteur de 15,1 milliards d’euros, ainsi que par des revalorisations salariales prévues par le Ségur de la santé à hauteur d’1 milliard d’euros« , explique la société Nile, en ajoutant que « les surcoûts sont partiellement compensés par une sous-consommation des soins de ville pendant la crise sanitaire à hauteur de 4,3 milliards d’euros et une contribution exceptionnelle des organismes complémentaires à hauteur de 1 milliard d’euros. » Car les Mutuelles, une fois encore, auront été mises à contribution !
2021, annus horribilis ?
En 2021, année objet du PLFSS en débat, la branche maladie devrait connaitre un déficit de 19 milliards d’euros, pour 199,5 milliards d’euros de recettes et 218,4 milliards d’euros de dépenses pour l’ensemble des régimes obligatoires de base. Soit près de 3 milliards d’euros de plus de dépenses que celles enregistrées pour 2020. Du côté de la branche vieillesse, le déficit sera de 6,6 milliards d’euros (245,2 milliards d’euros de recettes et 251,9 milliards d’euros de dépenses). Seule la branche autonomie serait à l’équilibre en 2021, avec 31,2 milliards d’euros de recettes et autant de dépenses. Au total, le déficit du régime général de la sécurité sociale serait, en 2021, de 24,7 milliards d’euros, toutes branches confondues. Enfin, L’ONDAM (1) de l’assurance maladie est supérieur de 8,9 milliards d’euros par rapport à 2020, ce qui correspond à une hausse de 6 % hors dépenses exceptionnelles de crise sanitaire.
Des hypothèses de croissance optimistes
Le tout sous réserve que la situation pandémique actuelle n’impose pas de revoir ces chiffres de déficits à la hausse. Car pour 2021, le gouvernement a retenu des hypothèses de croissance du PIB de 8,0 % en volume (après ‑10,0 % en 2020) et de 6,5 % de la masse salariale du secteur privé (et 6,8% de la masse salariale privée soumise à cotisations après ‑7,9 % en 2020), ainsi qu’une hypothèse d’inflation hors tabac (0,6 %) en très légère progression par rapport à l’année précédente. « Ce fort rebond d’activité interviendrait après un choc exceptionnel en 2020, mais serait insuffisant pour retrouver le niveau d’activité observé en 2019 (qui serait 2,7 % supérieur) « , souligne l’Annexe B du PLFFS présentée au députés. « Le Haut Conseil des finances publiques a rendu le 21 septembre 2020 un avis sur ces prévisions macroéconomiques dans lequel il estime le niveau d’activité anticipé pour 2021 atteignable. Il estime que le niveau ainsi que les prévisions d’inflation, d’emploi et de masse salariale retenues par le Gouvernement sont cohérentes avec les informations disponibles et plausibles« , ajoute le texte.
Autant dire que ces hypothèses volontaristes et optimistes risquent d’être démenties par la réalité. Mais 2021 est aussi une année qui nous fera vite plonger dans la préparation des futures présidentielles ! inutile, donc, d’anticiper les mauvaises nouvelles !
J-J Cristofari
(1) Pour 2021, l’ONDAM des régimes obligatoires de base et de ses sous-objectifs est fixé comme suit :
▪ dépenses de soins de ville : 98,9 milliards d’euros
▪ dépenses relatives aux établissements de santé : 92,3 milliards d’euros
▪ dépenses relatives aux établissements et services pour personnes âgées : 13,4 milliards d’euros
▪ dépenses relatives aux établissements et services pour personnes handicapées : 12,4 milliards d’euros
▪ dépenses relatives au fonds d’intervention régional : 3,8 milliards d’euros
▪ autres prises en charge : 3,8 milliards d’euros
Total : 224,6 milliards d’euros.
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